Zoltán Zsakó Bas reliefs de mémoire

Ici, des figures rayonnantes de nudité évoluent dans un espace vide comme un ciel incréé. L’abondance est convoquée ; elle sera entièrement dévolue aux corps, prétextes ultimes, nécessaires et suffisants. Abondance face au vide : tout s’offre aux fantasmes et aux fantaisies puisque aucun contexte concret ne leur oppose sa fâcheuse réalité.

Chez Zsakó, les corps sont beaux. Mais pour qu’aucun ennui ne s’attache à leur perfection, on les mâtine de monstruosité : la corne d’abondance résonne d’abondances. Bacchus, Eros, triomphent ; ils dévoilent à la grande faucheuse  dont la présence est toujours latente- un dynamisme heureusement fessu, une ivresse matériellement cristallisée.

Zsakó, avec humour –un humour qui sait utiliser la référence classique- est donc – à son insu peut-être, au nôtre sûrement- un moraliste galopant. Il a de l’art une notion pure et durable ; il a sur l’homme des espérances sans concessions. Son œuvre ferait penser que les formes vivent une éternité –ou une durée- recommencée.

Entre la lame du sabre et la douceure, entre la cosmogonie et la mythologie, il nous rappelle les magnificences du corps et des ressourçantes vanités. Zsakó caresse un temps qu’argente le palladium recouvrant ses intarissables surfaces.

Frédéric AMBLARD

La curieuse perfection de ses fantaisies cérébrales

Exemplaire par sa technique, exemplaire par sa science de la composition, par l’intelligence de ses propos, par la finesse de son exécution, par l’extraordinaire richesse de son vocabulaire plastique, grand connaisseur de toutes anatomies en bon état, sachant les interpréter par des dessins superbes, Zoltán Zsakó réussi à humaniser, à actualiser les situations les plus absurdes, celles des dieux grecs, des saints chrétiens, des zoos en liberté par un humour charmant et léger, non exempt de profondeur et même de moralité narquoise.

C’est d’une main complètement maîtrisée qu’il cisèle le plâtre et évide, comme en négatif sa surface pour y laisser un condensé de ses fantasmes et de sa culture, et l’empreinte, ensuite, révèle par sa lumière accrochée, à notre surprise, la merveilleuse intransigeance esthétique de ses visions, la curieuse perfection de ses fantaisies cérébrales, comme travaillées au scalpel, nous dirions, aujourd’hui au laser !
Le monde animalier de Zoltán vit en osmose avec les couples précédents, qu’ils ont apprivoisés, bestiaire magnifique d’ingéniosité et de délicatesse d’exécution, qui se ment par enchevêtrement savant, dans des guirlandes poilues et herbues et dans un équilibre arbitraire mais infaillible aux résultats toujours émouvants.

Dans certains endroits, des natures mortes faites de haches, des couteaux de cuisine, des coquillages, des bouteilles de vin omniprésentes, ligotées aux êtres sont là pour les accompagner pour un voyage éthylique vers la postérité.
Claude CHANOT

C’est beau et louche à la fois

“ C’est beau et louche à la fois ”. F.B.

“ Un univers peuplé de personnages élancés dont la nudité dévoile la fragilité, d’hommes et de femmes vivant en déconcertante symbiose avec une végétation filiforme et une kyrielle d’animaux réels ou imaginaires ”. Eva-Frédérique DAP

“ Le Kama Sutra vu par Bosch en lamé d’or ”. J

Autant que fer se peut.

S’il les avait connues, Charles Trenet eut certainement accueilli les sculptures-outils de Zoltán Zsakó dans son Jardin extraordinaire Là où les canards parlent anglais et les statuts s’en vont danser sur le gazon…

Celles de Zoltán font mieux encore ! Ce sont des jeux de mots métalliques, des métaphores de fer dans lesquels le coq-poulie, l’oiseau-serpe, la sauterelle-clef anglaise ou le chien-cric constituent une nouvelle race de mutants zoomorphes qui nous parlent.

Car, le saviez-vous ? Il existe des tenailles callipyges, des tournevis priapiques qui, du boulon enjôleur au sourire du sécateur, constituent un univers où le sculpteur marie avec bonheur et fantaisie le vétérinaire et le plombier.

Certes, d’autres avant lui : Picasso ou César pour ne citer que ceux-là, ont aussi pratiqué cet art de la récupération mais jamais me semble-t-il avec un tel évident plaisir, allié à une justesse de la trouvaille formelle. Zoltan, dans cette œuvre, dépassant la simple anecdote, devient une sorte de fabuliste où le chalumeau et la soudure ont remplacé la plume et les alexandrins.
Il capte parfaitement ce qu’un objet usuel, derrière sa banalité quotidienne, recèle de poésie et de mystère insoupçonnés.
Car l’artiste est un passeur de rêves et c’est à son talent que revient le privilège de nous les dévoiler.

Gérard Landrot